Les perturbateurs endocriniens sont aujourd'hui reconnus comme une menace pour la santé des populations. En effet, un consensus scientifique semble se dégager au sujet des effets que certaines substances chimiques, telles que le Bisphénol A ou les polychlorobiphényles (PCB) présentes dans de très nombreux objets de la vie courante,  peuvent entraîner sur le métabolisme humain (contenant alimentaire, cosmétique, etc.), et ce, même à de très faibles doses (Gore et al. 2015).

                                                                                           

Alors que chercheurs et militants environnementalistes alertent déjà sur cette situation depuis la fin des années 90, force est de constater l’absence de réponse publique jusqu’à la fin de la première décennie des années 2000 (Jas et Gaudillière 2016) et d’une information précise et systématique à destination des publics exposés. A titre d’exemple, les premières mesures prises par le gouvernement français datent de juin 2010, avec l’interdiction du bisphénol A dans les biberons, faisant suite à de nombreuses controverses scientifiques.

 

L’intervention des pouvoirs publics se décline désormais dans une stratégie quinquennale sur les perturbateurs endocriniens (2014-2019). Pour expliquer un tel décalage temporel, certains auteurs parlent alors de “production d’ignorance” pour rendre compte des mécanismes par lesquels certains problèmes sanitaires ont longtemps été ignorés avant d’être reconnus en tant que tels (Fillion et Torny 2016). Loin d’être mécanique, le lien entre l’identification de facteurs de risque et l’action publique mérite donc d’être interrogé dans le cadre des perturbateurs endocriniens, en tenant compte des contextes nationaux spécifiques.

 

Dans le cadre d’un séminaire interdisciplinaire, nous proposons d’interroger la construction de l’exposition aux perturbateurs endocriniens comme un problème de santé publique (Henry et Gilbert 2009), en combinant les apports issus de différentes disciplines, mais aussi en sollicitant l’avis des acteurs dont le travail consiste à faciliter l’accès à l’information au sujet des risques engendrés. Ce séminaire sera donc l’occasion d’interroger la trajectoire des connaissances scientifiques dans différentes arènes (scientifique, médiatique et politique). De ce fait, nous nous intéresserons moins à la façon dont sont produites ces connaissances, qu’à la manière dont celles-ci sont appropriées par des acteurs aussi divers que des scientifiques, des élus locaux, des journalistes ou encore des associations d’usagers 

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Références : 

Gore, A. C., Chappell, V. A., Fenton, S. E., Flaws, J. A., Nadal, A., Prins, G. S., Toppari, J. & Zoeller, R.T. (2015). Executive Summary to EDC-2: The Endocrine Society's Second Scientific Statement on Endocrine-Disrupting Chemicals, Endocrine Reviews, vol. 36, (6), 593–602.
 
Jas, N. & Gaudillière, J. (2016). Les perturbateurs endocriniens en France. Une autre trajectoire. Sciences sociales et santé, vol. 34,(3), 19-46

Fillion, E. & Torny, D. (2016). Un précédent manqué : le Distilbène® et les perturbateurs endocriniens. Contribution à une sociologie de l’ignorance. Sciences sociales et santé, vol. 34,(3), 47-75
 
Gilbert, C. & Henry, E. (2009). Comment se construisent les problèmes de santé publique. Paris: La Découverte.
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